BANAL DAY

Rémy
Juillet 2013


Il est l’heure de se réveiller. Dans la bouche le goût pâteux de la nuit. La poitrine oppressée par la chaleur de la couette. Je sue. Le soleil chiffonne mes yeux en me criant que j’ai encore dormi trop longtemps, sous-entendu que je me suis couchée trop tard. La chambre a encore l’odeur du tabac froid des cigarettes que j’ai éteintes pourtant encore chaudes quand l’aube est venue creuser mes fenêtres de sa lueur chiante.

Je m’assieds sur le bord du lit. Je confronte mon regard à la fenêtre. Je vois que la ville chie encore ses moutons dans les rues, ça grouille, ça grésille, ça klaxonne, ça s’agite, ça me fatigue. Je passe la main dans mes cheveux, la jungle est tenace et menace ma nuque d’étouffer. J’attrape une pince et coince mes cheveux graissant sur le dessus de mon crâne.

Il est temps que je retire ma culotte, même d’ici je perçois l’odeur de menstruation fermentée. Nue dans la salle de bains, un pied sur la cuvette des toilettes, je retire mon tampon. Au bout de la ficelle, j’observe le bel objet blanc souillé de mes caillots de sang marron. Il empeste l’air des effluves de mes entrailles, je sens comme l’étal d’un boucher sur un marché de Juan-les-Pins au mois de Juin.

Debout et nue dans la douche, je règle l’eau pour qu’elle soit très chaude. En même temps je pisse. Cela donne à l’air une odeur aigre acide. La masse de cheveux dans la bonde empêche l’eau de s’écouler normalement, elle s’accumule et se teinte de la couleur jaune de mon urine. Plus tard c’est la mousse du shampoing qui vient couvrir mes pieds et cacher la misère de mon sens de la propreté.

Je n’ai plus de filtre à  café, j’hésite à réutiliser celui qui me sert depuis mardi, rétrospectivement je suis heureuse d’avoir encore des tampons neufs. Je mets trois sucres dans ma tasse pour faire passer le goût du café. Je récupère dans l’évier un couteau., je l’essuie avec le torchon. Le pain de deux jours tombe un peu en miettes quand j’y taille des tartines longitudinales.

Il n’y a plus de beurre dans le frigo. Sans ma dose de gras, je serai d’une humeur exécrable. J’ouvre le friseur saturé par la glace, il doit me rester du beurre. Derrière les pieds bleutés du bébé qui dépassent du torchon, j’aperçois le beurre. Beurrer ses tartines avec du beurre congelé c’est difficile, je parsème des morceaux sur mes tartines. Cela fait comme de petits icebergs gras qui flottent dans mon café.

Je mets une culotte propre, par contre je n’ai plus de soutien-gorge propre. J’enfile celui qui sent le moins ma transpiration. Je mets mon jeans et un débardeur parce que c’est le printemps. Je prends mon sac, j’y cherche mes cigarettes. J’allume enfin ma première clope, la bouche remplie de fumée, je regarde par la fenêtre. Bientôt ça sera à moi d’être dans la rue et d’agir comme un animal de foire, je n’en ai pas envie.
Un café, une clope et nécessairement l’envie de faire caca. Je pose mes fesses sur la lunette des toilettes. Elle est froide. Je regarde le bout de ma clope s’encombrer de cendres. Je fais une petite contorsion pour les faire tomber dans les toilettes. Je suis maladroite, elles maculent la lunette, je les essuie d’un revert de main. Sous moi le bruit de la merde qui tombe à l’eau. J’attrape quelques feuilles pour m’essayer et je tire la chasse.

Il est déjà 10h06 à  ma montre. J’embauche à 11 heures, je n’ai pas envie d’être en retard. Je prends la voiture. Il fait trop chaud dans la voiture, je baisse les fenêtres. À cette heure-ci, la circulation est fluide. Il faut juste s’arrêter aux feux rouges. Je profite de l’arrêt pour fouiller mon nez et en extraire une sécrétion nasale faite de morve et d’un peu de sang. J’ai l’impression d’avoir retiré un tampon usagé de mon nez. Je profite de la fenêtre ouverte pour relâcher ma prise sur la route. Le soleil tape. J’attrape dans mon sac mes lunettes de soleil.

Je tourne un moment dans le parking pour y trouver une place. Je sors mon cul de la voiture, direction le vestiaire. Je suis encore dans les temps pour arriver à l’heure. Je presse le pas, j’entendre dans le vestiaire, je sens la sueur perler sur mon front et sous mes aisselles. J’aurai dû penser à  mettre du déodorant. Je mets ma blouse, la bonnette jetable sur ma tête et ces gants eux aussi à usage unique.

J’entre en cuisine. Mes collègues sont déjà en place. Les élèves du collège ne vont pas tarder à arriver. J’ai juste le temps d’ouvrir les boîtes de macédoine de légumes et d’y incorporer la mayonnaise. Quand je dois passer la main dans la boîte pour aider avec la masse compacte des légumes à sortir de sa conserve, ça me rappelle quand j’ai dû sortir mon placenta dans la salle de bain.

La cantine résonne des voix des enfants. C’est toujours fatigant les enfants. C’est toujours trop bruyant. Je m’ennuie. J’ai déjà envie d’être ailleurs. J’ai envie d’une clope aussi. Et puis j’ai hâte que le soleil se couche. Mais je n’ai guère le choix, je dois remplir les assiettes de cette macédoine de légumes que je ne pourrais pas manger moi-même. Le service fini, on se retrouve entre collègues pour manger à notre tour. Et toujours pour finir un café et une clope.

J’ai envie de pisser, je profite d’être accroupie dans les toilettes à la truque pour changer mon tampon toujours souillé d’un rouge profond. La journée est trop longue. J’ai envie d’une sieste. À 16 heures, je reprends la route et je rentre chez moi. Je me sers un Martini rose. Je le bois devant la télévision. Je m’allonge sur le canapé, je retire mes chaussures et je m’endors.



4 commentaires:

  1. Titre très bien choisi pour ce texte, trash dans le sens qui me plait le moins. Et pourtant, ça fonctionne, cela donne la nausée, c’est parsemé de petits détails qui font frissonner... Cela manque d’une chute plus percutante, mais, c’est un « banal day » ;)

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  2. Effectivement, le titre est bien choisi et j'ajoute que le style est bon. En revanche, trop de trash tue le trash... Il aurait fallu remplacer certains passages trop crus à mon goût par d'autres nous plongeant dans la psychologie du personnage (pour expliquer par exemple le bébé dans le freezer...). Bravo en tout cas pour l'audace.

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  3. Bof ! Je n'arrive pas du tout à entrer dans cette énumération, litanie nauséabonde de la vie d'une femme et encore de celle qui n'a aucune estime de soi ! Cette description plate ne permet pas de s’apitoyer une seule seconde sur son sort et encore moins sur ce bébé qu'elle a supprimé. Beaucoup d'incohérences "la nuque" qui s'étouffe ? Le friseur ( pour freezer)... Bref, aucun intérêt à cette prose ! Désolé !

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  4. On peut être trash et ne pas tomber dans l'excès de descriptions trop détaillées et inconvenantes. Tout aurait pu être plus suggéré et aurait donné de la hauteur au texte. Je n'accroche pas à cette littérature trop rude et en odorama désagréable. Le début du texte est déroutant par le nombre de point. L'écriture ne s'écoule par, elle heurte les yeux et la diction.

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