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Marie et Céline


Jeu d'avril 2020
Par Sylvain Prévost


Seule dans sa luxueuse villa surplombant Hollywood Boulevard, Marie profitait d'une petite pause sportive avant la venue de la société en charge du ménage. La salle de sport, qui donnait immédiatement sur l'immense parc vicinal aux accès hautement sécurisés, était particulièrement bien équipée avec sa piscine intérieure, son jacuzzi et ses multiples appareils de cardio connectés. En fond sonore, BMF TV diffusait sur écran géant les toutes premières nouvelles de l'année 2022. Malgré ce confort ouaté, Marie n'avait pas la tête au sport, sa concentration était parasitée par l'apparition de quelques joggeurs milliardaires et les images brumeuses d'une Saint Sylvestre courte et particulièrement arrosée. Elle n'avait d'ailleurs pas remis les pieds dans le salon où trônait sur la table basse la carcasse du poulet rôti de la veille flanquée de deux bouteille de Dom Perignon et d'une flûte à champagne à moitié vide. En ce samedi 1er janvier, malgré le soleil de Californie, les nouvelles n'étaient pas bonnes : Emmanuel Macron venait d'être condamné pour haute trahison, emportant dans son sillage une partie importante de la classe politique française. Il était question de crise institutionnelle profonde, de marasme économique et d'un début de révolution. Un jeune journaliste français aux allures de sainte nitouche semblait affolé par le mystère entourant la fuite de la première dame hors du territoire français. Marie éteignit le poste de télévision. La mine triste, elle remit en place ses lunettes de soleil et fut prise d'une attaque de panique à la vue d'une joggeuse qui s'était brièvement arrêtée devant la baie vitrée et qui l'observa furtivement avant de reprendre sa course. Merde ! Ramassant la tartine au brie tombée du mauvais côté sur le tapis de sol, Marie tenta de stabiliser les tremblements de ses mains : la joggeuse ressemblait trait pour trait à Céline Dion avec son short ras-la-moule, sa pochette de sport Vuitton et son allure de gazelle famélique. C'est impossible, cette garce n'oserait pas rôder après m'avoir piqué mon mari ? C'est à cause de toi si je suis cloîtrée ici, si ma vie est un désert ! Dire que cette salope a osé m'envoyer une petite culotte brodée "En marche" !

9H00. Marie s'était calmée. Réfugiée dans sa chambre à l'abri des regards, elle contemplait le jardin à l'anglaise qui brillait sous la rosée du matin. Si seulement je pouvais sortir... Le regard vague, elle songeait à l'homme à qui elle avait tout donné, celui-là même qui l'avait trahie au sommet de sa gloire. La sonnerie de son portable la fit sortir de la torpeur mélancolique. Numéro masqué.
- Allô ?... Hello ? Who's speaking ?
- Tabarnac, c'est Céline Dion ! Ne me dis-tu pas qu'on est voisines ? Veux-tu pas courir avec moé aussi ? Wô ! Allez, gros becs et crisse moé donc patience, Brigitte !

Sans titre


Par Bernadette Mortier



Le réveil est difficile ce matin. Marie, les yeux fatigués par une nuit où elle a peu dormi, déambule dans son appartement.
Elle se réjouit toutefois à l'idée d'avoir une journée seule, sans contraintes.
"Je vais enfin avoir un peu de temps pour m'occuper de moi!" se dit-elle
Elle passe furtivement devant son armoire à glace qui lui renvoie une image peu flatteuse!
"Quelle horreur, le confinement ne me va plus, j'enfle à vue d’œil, je ne vois bientôt plus ma petite culotte! Il faut à tout prix que je me bouge un peu si je veux retrouver mon corps de gazelle!"
Elle allume machinalement le poste de télévision, jette un regard sur le balcon où s'est déposée la rosée du matin. La journée va être agréable.
Elle avale une biscotte et un verre d'eau pour se donner bonne conscience et c'est sans grande conviction qu'elle grimpe sur son vélo d'appartement.
Heureusement le reportage à la télé l'intéresse et lui apporte un peu de motivation.
Paysages à couper le souffle, désert à perte de vue....Le paradis!
Plus elle pédale, plus elle s'évade. Mais ça ne dure jamais bien longtemps avec Marie!
Elle pense déjà à se récompenser de son effort et surtout, à ce qu'elle pourrait bien manger ce midi...poulet rôti, salade composée ?
Si elle ne mange qu'une salade, elle préparera un gâteau pour compléter; elle a un petit moule qui fera bien l'affaire.
Par contre, elle ne se souvient plus où elle a posé son porte-monnaie en rentrant hier....Certes, ce n'est pas un Vuitton, mais il a le mérite d'être bien pratique, et elle en aura surtout besoin pour faire quelques courses.
Elle descend de son vélo à la recherche de ce fameux crapaud.
En passant devant le meuble de l'entrée, Marie s'arrête et relit le courrier que lui envoyé sa sœur; ce courrier est accompagné d'une photo d'elle et de son dernier petit ami.
Et là, c'est le choc, Marie n'en revient toujours pas; c'est vraiment le sosie d 'Emmanuel Macron!
Comment va-t-elle annoncer ça aux parents?
C'en est déjà trop pour aujourd'hui.
Marie retourne au lit!

Par Isamatelote

La rosée du matin invite à la ballade
Goûte-la, goûte-la,  petit poulet mignon !
Oublie confinement, prudence et précautions.
Bas les masques ! Vois, plus personne n'est  malade.

 

Il n'est plus de barrière, plus de balustrade
Saute, saute au jardin, petit poulet mignon !
Écoute l'annonce  d'Emmanuel Macron :
En mai est revenu le temps des roucoulades !

 

Dans le jardin désert,  il est une gazelle
Une coquine qui, sans petite culotte,
D' Ève la tentatrice a coiffé la biscotte
Attendant qu'on lui moule un air°° de ritournelle

Des coqs aux ergots d'or convoitent la donzelle
Méfie-toi, méfie-toi, petit poulet mignon !
Ils croqueront la belle avec délectation
Ces Vuitton, ces Prada, Hermès et ribambelle


Cours-y vit', cours-y vit', ils vont te la ravir !
A l'ombre du pommier, cueillez votre plaisir..



° biscotte en argot a le sens de casquette
°° moudre un air, jouer un air sur un instrument à manivelle

Sans titre

Par Marilyn Capp


Marie est seule chez elle aujourd’hui et en profite pour faire un peu de sport devant sa télévision.

Faire du sport, elle en a vraiment besoin pour se changer les idées. Depuis le fameux discours d’Emmanuel Macron répétant « nous sommes en guerre », elle est de plus en plus anxieuse. Et elle se sent seule aussi. Elle ressent comme un désert social cette période où les rares interactions avec d’autres être humains sont numériques. Les fameux apéros-zooms ont du succès ha ça oui ! mais pas pour Marie, car ses rares amis ne sont pas à l’aise avec la technologie, du coup, pas d’apéros-zoom pour elle. Pourtant c’est bien vers un monde numérique qu’on va tous, il faudra bien s’y adapter.

« Bon allez j’y vais 1,2,3,4,5… » souffle Marie en petite culotte et en brassière sur son tapis de sport. Il faut éliminer la biscotte en trop du petit déjeuner si elle veut ressembler à une gazelle à la sortie du confinement. Elle ne veut pas se laisser aller, et veux pouvoir rentrer dans son jean fétiche qui lui moule merveilleusement bien les fesses. Elle veut être à son avantage quand on aura le droit de sortir et de rencontrer des gens de nouveau.

Et puis il y a Marc aussi. Marc avec qui elle communique depuis peu sur Adopte un mec. Lui aussi se sent seul. « Ce confinement va tous nous rendre fous » dit-il souvent. Marc s’occupe en cuisinant, c’est un vrai cordon bleu : poulet rôti, frites, risotto, dal, etc... Il cuisine toutes sortes de bons petits plats pour lui et sa fille une semaine sur deux.

Pourtant il est tellement svelte sur ses photos de profil ! Marie le taquine un peu :

« -dis tu n’aurais pas mis des photos de toi il y a dix ans par hasard ?

-Hahaha non je te jure, je fais beaucoup de sport comme toi c’est tout.

Je t’inviterai à dîner dès que ce sera possible tu verras tu vas te régaler ! » promet-il.

« J’en salive d’avance » écrit Marie sur son téléphone tout en rêvassant sur son canapé, emmitouflée dans son peignoir Vuitton. Tout en regardant par la fenêtre la rosée du matin, elle imagine cette future rencontre de mille et une façons possibles, toutes plus romantiques les unes que les autres. Elle soupire. Elle est incorrigible elle ne peut pas s’empêcher de tirer des plans sur la comète alors qu’elle connaît à peine cet homme. Mais il semble si charmant ! et si c’était lui ? l’amour de sa vie ? qui sait ?

Marie attend. Patiemment. Allez, encore une journée à barrer avant le 11 mai.

Pas de mort dans l'âme

Par Stéphane Gays 


Marie se réveille assez tard dans la matinée. C'est la première fois qu'elle peut flâner dans son lit et penser à la journée qui l'attend. Le sourire aux lèvres, elle dégage sa couette et réalise qu'elle ne porte qu'une petite culotte et non pas son pyjama hideux habituel. 
Marie se lève et enfile une petite tenue de sport qui la moule parfaitement et ses sandales sport de chez Vuitton. Elle s'approche du miroir et admire sa silhouette de gazelle qu'elle n'avait pas travaillée depuis plusieurs mois.  En relevant légèrement le haut de sa tenue, elle remarque quelques bleus qui commencent à s'estomper. Elle passe ses mains sur son corps avec sensualité et sur ses bleus encore un peu douloureux. 
Marie s'approche de la cafetière posée sur le plan de travail de sa cuisine et appuie sur le bouton marche. Elle tartine avec du beurre salé une biscotte qu'elle casse au passage. Elle n'en fait pas état plus que ça et garde un large sourire aux lèvres. 
Sur son balcon, Marie une tasse de café à la main regarde un Paris déjà bien actif. Les jardinières de son balcon qui habituellement à son réveil sont couvertes par la rosée du matin, ont déjà ouvertes leurs fleurs baignées par un soleil de midi.  
Marie entre dans son salon et saisit la télécommande de sa télévision. Elle parcourt les différentes chaînes que lui propose la TNT et tombe sur BFM TV qui rediffuse une allocution de la veille par le Président Emmanuelle Macron.  Elle commence ses exercices sportifs par un échauffement nécessaire pour éviter tout claquage. Elle repense en voyant le président plutôt beau garçon, à son désert sentimental ou à ses rencontres malencontreuses avec des hommes plutôt violents qui déteste qu'elle se pomponne ou s'habille comme une "pute".  
A la fin de ses exercices, Marie attrape une serviette pour essuyer sa transpiration et affiche un large sourire de jubilation. Elle coupe la télévision et passe devant  la table de la salle à manger sans même regarder son conjoint assis devant, la tête plongée dans son assiette, un morceau de poulet rôti dans la bouche et le visage livide d'un cadavre.

Sans titre


Par Joël Peran



Marie répond à l'appel de la sonnerie stridente du radio réveil en pressant le bouton d'arrêt. Elle le connait par coeur.

Elle s'étire délicatement, baille et se lève doucement. Elle enfile ses pantoufles : le parquet de la chambre est peut être

tiède, mais le carrelage de la cuisine ne ferait pas bon ménage avec ses pieds nus. Machinalement, elle allume la télévision

pendant que son café se réchauffe dans le micro onde. Emmanuel Macron apparait en gros plan, derrière un journaliste présentant

les infos. Marie sourit légèrement. La voix du journaliste ne correspond pas aux mouvements de lèvres du président, mais le mot

qui lui vient est : ventriloque. Elle écoute sans écouter. Elle étale une fine couche de miel sur une biscotte et attend

patiemment le ding du microonde, signe que son déjeuner peut commencer. Marie aime prendre son petit déjeuner debout. En flanant.

Marie adore le craquement que produit la biscotte quand elle mord dedans. Elle pose le regard par la fenêtre. Le boulevard en

dessous est désert. Les voitures sont à l'arrêt, sagement endormies au bord des trottoirs. Aucun passant. Aucun bruit.

Sauf celui de sa biscotte qui en devient maintenant presque dérangeant. Le journaliste sur l'écran a laissé place à des

publicités. On passe de Louis Vuitton à des tranches reconstituées de poulet rôti. Passionnant. Le regard de Marie se perd au loin.

Bien plus loin que la barre d'immeubles qui longe le boulevard. Elle rêve de marcher dans l'herbe fraiche,

de sentir sous ses pieds nus la rosée du matin. Elle rêve d'extérieur, de vie, de vagues, d'embruns sur les rochers. De soleil aussi.

Une musique la tire de sa rêverie. Entrainante mais pas entêtante. Sur l'écran, une jeune femme blonde prodigue à ses téléspectateurs

des conseils de fitness ou de gymnastique. Marie se dit qu'elle devrait se remettre un peu au sport aussi. En tous cas, l'émission

lui donne envie. C'est le temps qui manque. Son déjeuner terminé, elle se dirige lentement sous la douche. L'eau chaude, l'odeur

vanillée du gel douche. Marie se sent bien. Elle sort nue de la salle de bains, revient dans la chambre en abandonnant la serviette

autour de ses cheveux. Elle prend une petite culotte en posant les yeux sur le dernier petit mot de son homme qu'elle a

conservé, près de la table de chevet. "Je t'aime ma Gazelle". Marie sourit, enfile un T Shirt blanc et bleu, son vieux

jean's un peu élimé. Elle retourne dans la salle de bain pour se coiffer. Le miroir lui renvoie son reflet fatigué. Plus de cinq

semaines. Plus de cinq semaines qu'elle se bat sans relâche avec ses collègues, le "personnel soignant" dont on parle tant, tous

forgés dans le même moule, celui de l'altruisme, du dépassement de soi. Et de l'oubli de soi. Il faut vaincre. Pas le choix.

Marie enfile ses basket, une veste en coton et prend son sac à main. Enfin, son gros sac. Elle sort de son appartement après

avoir vérifié que tout était éteint. Sur le palier, aucun bruit. La résidence confinée dort encore.
Et Marie désire plus que tout que demain soit comme avant.

Sans titre

Par Stefanie Lafitte-skrzatek‎


 

Marie est seule chez elle aujourd'hui et en profite pour faire un peu de sport devant sa télévision.
Grande gazelle en petite culotte elle se meut au rythme de la gym tonic de Véronique et Davina, icônes des années 80.
« Ainsi faisait grand-mère pour garder son corps mince et souple entre la biscotte du matin et le poulet roti du déjeuner ! » Pense-t-elle.

Et un, et deux, et trois.... ses gestes sont harmonieux et élégants. Il est vrai qu'elle a pratiqué la danse durant de longues années depuis son plus jeune age. Cet acquis ne la quitte pas. Elle se sent aussi désirable que la première dame.... Non, pas celle de Macron qui pourtant partage avec elle la classe et le raffinement. C'est à Carla Bruni qu'elle pense. Grande, longiligne, souriante, détendue, naturellement belle ; n'ayant pas besoin de Vuitton pour se mettre en valeur.
Un regard par la baie vitrée et le monde désert lui semble habillé par la rosée du matin.
Quel bonheur ce corps libre qui bouge, sans Short, sans legging qui moule !
Une bonne odeur sort de la cuisine... Café chaud, tartines grillées ?
A pas de loup elle se glisse vers l’entrebâillement. « Hello ! Léo ? Déjà de retour ? Avec un bon petit déjeuner ? »
S'ensuit un langoureux baiser.

Sans titre

Par Rama


Marie est seule chez elle aujourd’hui, ses chats ont déserté. Comme chaque jour son salon est entièrement disposé pour accueillir le Caoudo, Le grand chef. Marie est disponible en ce moment, libre comme l’air, elle a le temps. Et lui, Il va, justement aujourd’hui, parler à la télévision. Cela fait des jours qu’elle l’attend maintenant. Et aujourd’hui Il doit parler ! Cela fait des semaines maintenant qu’elle est plongée dans ce désert mental. Cette absence de sortie depuis 40 semaines confine à la folie, elle se dit, en enfilant sa tenue de sport. Mais qu’attend-elle au juste de ce blabla public à la télévision ? Des mois à crever d’ennui, à se gaver de biscotte, il n’y a plus de pain dans les officines, la farine est une denrée rare aujourd’hui. Des mois qu’elle attend que son Caoudo lui dise si elle peut sortir. Des mois qu’elle se demande si elle n’aurait pas moins de valeur qu’un kilo de T45. Stop, aujourd’hui c’est différent, elle le sent, stop, Il va parler. En enfilant ses baskets et son bandeau, elle appuie sur la télécommande. C’est quand même super ce choix de programme, elle se dit. Plus que 14 minutes avant qu’il s’exprime, elle a encore le temps. De toute façon, il apparaîtra de lui-même, à l’heure, sur tous les écrans de la maison. Elle commence les exercices, 40 squats, 40 lunges, 40 ATR, 40 c’est le nombre. Elle souffle et elle recommence 40 squats, 40 lunges, 40 ATR. Elle reprend son souffle. Une moule, voilà ce qu’elle est devenue, 40 semaines à rien branler, pas de Hit, pas de Tabata, pas de Yoga, pas de Sport, pas d’étirements, pas de mouvement, pas de danse, rien, une moule, voilà, une moule accrochée à son appartement. Stop. Aujourd’hui ça va être différent, elle bouge, des décisions vont être prises. Enfin. Des journées, des semaines et enfin des mois, à flemmarder comme une gazelle en petite culotte à attendre qu’on lui dise quoi faire... 40 semaines à lézarder en petite culotte comme une femelle orignal devant son ordi, sa télé, son téléphone. Stop, aujourd’hui le mouvement lui donne des ailes ! Dès qu’elle pourra sortir, elle sait ce qu’elle fera. Elle ira s’acheter le dernier sac Vuitton : le beau marron barré de deux lettres jaune fluo GJ. Le nouveau modèle est vraiment classe. Y’en a quand même qui en ont de l’imagination, elle se dit Marie, à nouveau affalée dans son canapé confit dans son petit deux pièces. Louis par exemple, lui il a de l’imagination. Quand même il fallait le faire, sortir un sac à 1000 balles barré d’un GJ jaune fluo, collector-dé-confinement ! Juste de quoi donner envie de claquer sa prime de front à la sortie. Elle est pas comme ça Marie, elle a pas des idées comme ça, pas malines comme ça. Louis lui, il avait même eu l’idée de faire, et c’est peut-être ça d’ailleurs, elle se dit, qui avait mis le feu au poudre à l’époque et que du coup les hirsutes étaient sortis en nombre dans la rue pour réclamer plus de justice sociale et aussi du fric pour l’hôpital public, bref Louis donc il avait même eu l’idée de récupérer les gouttes de la rosée du matin sur les feuilles du monde et de les mettre en bouteille. Ça avait été une belle idée et ça s’était vendu comme des petits pains dans les milieux riches et autorisés. BipBipBipBipBip !!! Ça raisonne dans tout l’appartement, l’allocution va commencer. Tous ses appareils électroniques se mettent en route. Emmanuel Macron apparait : « mes chers compatriotes, bla bla bla blablabla bla bla bla... Brigitte a préparé un poulet rôti ... blablabla blablabla » peinnnnn pein pein pein pein peinnnnnnnnnnn peinnn pein pein peinnn pein peiiiinnnnnnn BipBipBipBipBip Marie c’est ça maintenant sa chanson préférée. La marseillaise. A 20h, elle ouvre la fenêtre et chante à tue tête et les soignants de sa rue l’applaudissent. Voilà qu’ils sonnent chez elle, les soignants, habillés de blanc, masqués, gantés, ils l’emmènent, les bras dans le dos. J’ai gagné, elle se dit, je suis sortie. Pein pon pein pon pein pon pein pon. BipBipBipBipBipBip.

Marie


Par Patloup



Ouvrant un œil encore embrumé de sommeil, Marie goute avec délice le silence du matin.  Voilà des jours que sa vie semble envahie du roulement continuel et tonitruant d’une politique et d’une économie envahissantes… On entent que ça à la télé… C’est Emmanuel Macron et ses points de presse finalement plus angoissants que rassurants… Et même Vuitton qui licencie près d’une centaine de travailleurs.  Les faux-Vuitton seraient trop bien faits… 
Hier, Marie avait tenté de se rabattre sur les médias-papier, à la recherche désespérée d’une bonne nouvelle.  Rien.   Un océan de mauvaises nouvelles à faire déprimer un clown. Ou un désert de bonnes nouvelles, ça dépend du point de vue. Même la Rosée du matin, le petit journal local, n’arrivait pas à écrire une seule ligne positive.
Et ce matin, elle avait enfin déclaré la journée « sans média ».  Enfin, le silence. Le téléviseur et la radio demeureraient obstinément fermés.  Elle ne lirait pas une seule ligne. Sur cette résolution, Marie se tortilla pour s’extraire des draps.  Dehors, le chant d’un cardinal amena un sourire serein sur ses lèvres.  Elle jeta un coup d’œil à la fenêtre. La neige avait enfin fini de fondre.  Elle choisit une petite culotte et hop, dans la douche. S’étant un peu éclairci les idées, elle mit un bon cappuccino en route, et plongea une tartine  bien croquante dans une confiture de myrtilles maison.  Elle s’autorisa une seule lecture ce matin : le livre de recettes que sa fille lui avait donné, il y a près de huit ans de cela.  Elle composa, tout en le feuilletant, le menu de la journée : poulet rôti pour le déjeuner et pour le dîner, moules frites, le tout accompagné de son vin blanc préféré, Nuit furtive.
Savourant toujours le merveilleux silence qui l’environnait telle une caresse, elle prit sur la tablette sa cassette d’entrainement (une bonne vieille VHS) et débuta lentement son enchainement d’aïkido.  Qui aurait dit, à la voir aussi souple qu’une gazelle, qu’elle fêterait demain son quatre-vingt quinzième anniversaire.

Sans titre


Par LThierry


Marie, en plein exercice sportif devant sa télévision, ne saura jamais rien du pari d'une traversée peu commune qui ne fera pas, pour une fois, la Une des gazettes. Événement à potron-minet où il serait question de la traversée en petite culotte du désert d'un 55 bis faubourg St-Honoré confiné dans son moule mordoré et poudreux, par Madame, débarrassée des pudeurs de la gazelle nimbée de la rosée du matin, ci-devant porte manteau Vuitton à la ville, partie à la recherche d'une moitié de poulet rôti aux communs pour sustenter sa moitié – Emmanuel Macron (pour ne pas le citer) – qu'une biscotte n'aura pas rassasié.

Petite bafouille de mon cru



Par Malik Tralliam



La veille au soir, on nous avait annoncé la prolongation du confinement jusqu'à l'été pour nous garantir le maximum de sécurité afin de ne pas rechuter dans ce cauchemar que nous subissons  depuis un moment déjà, ce p.. de Covid 19. S'en était suivi une horde de commentaires haineux.
J'avais donc coupé la télévision et mon accès à Internet pour aller me coucher. Malheureusement ce fut encore une nuit blanche comme tant d'autres.
Au lever du jour, l'air était chaud, les embruns de l'océan qui grondait tout proche de nous, venaient provoquer mes sinus de leur odeur de liberté.
Cela suffit à me décider à me lever afin de fouler pieds nus la rosée du matin qui couvrait le gazon de mon petit coin de jardin.
Quelle douce impression, je me sentis très vite envahi par un sentiment de plénitude. Pour la première fois malgré le malheur qui rôdait autour de nous, je me retrouvai, moi aussi,  enfin libre.
Le soleil chauffait ma peau, seul dans mon quartier entouré de maisons secondaires, je savourai cette nature encore préservée de notre ravage. Rien que pour moi. Plus rien n'avait d'importance.
Mais malheureusement mon organisme d'humain me rappela à l'ordre par de bruits disgracieux de mon estomac. Il fallut donc me décider à rentrer afin de me préparer un petit déjeuner.
Nous avions été envahis malgré les consignes de sécurité par des touristes qui avaient défié le confinement. Ainsi en s'installant, avaient dévalisé les quelques  commerces encore ouverts dont le stock de marchandises était déjà trop juste pour nourrir tous les insulaires. Même plus un poulet rôti à se mettre sous la dent. Que c'est triste les TPMG (Tout Pour Ma Gueule)
C'es ainsi qu'il ne me restait plus dans mes placards que quelques biscottes, un fond de pot de confiture et quelques capsules de café.
C'est avec un plateau garni de ces quelques aliments que je m'installai à la table de jardin avec une vieille gazette déposée dans la boite aux lettres depuis un moment déjà.
Un ramassis de fakes news, de photos insipides. A se demander si c'était un exemplaire publicitaire ayant pour but de racoler quelques nouveaux clients pour la maison de presse qui l'éditait.
Etait-elle écrite par de vrais journalistes ou plutôt des journaleux, comme j'aime à nommer ces reporters low cost, aimant semer la zizanie partout où ils déposaient leur torchon.
Ce fut donc pour la xième fois que je relu avec l'esprit vagabond les différents articles. " Comme quoi le papier se laisse écrire " me dis-je une fois de plus.
Soudain, je remarquai que deux pages furent collées  l'une à l'autre depuis la livraison de cette médiocre missive. Avec délicatesse et patience, je réussi à les séparer sans dégâts pour accéder à leur contenu, tout aussi peu littéraire que ma liste de choses à faire durant cette pause imposée.
Etre to do list et adepte de la procrastination, je n'avais évidemment pas encore fait grand-chose des choses que j'avais ainsi mises sur papier.
En titre en gros caractères gras, je pouvais lire : Emmanuel Macron fuit la France avec ses valises Vuitton chargées  du contenu des caisses noires de la République, Il voulait se cacher dans le désert …, un peu de blabla insipide et un montage photos grossier. Ils avaient même osé y rajouter grâce à un logiciel de correcteur de photos à y glisser une petite culotte dépassant de la poche de son pantalon. Gonflés les gars !!
" Franchement, de qui se moque-t-on ?" Pensais-je en repliant ce tissu d'inepties.
Moi qui déjà tenais à mon indépendance intellectuelle, je ne serais jamais candidat pour rentrer dans le moule de la croyance de ce ramassis de stupidités. Pensaient-ils réellement ne pas déposer le bilan en publiant ce genre de torchon?
" Mais c'est vraiment nous prendre pour des débiles ?", hurlais-je en ramassant mon plateau pour le déposer avec fracas sur le plan de travail à côté de l'évier.
Cette connerie avait eu raison de ma bonne humeur et la seule solution fut de retourner me coucher afin de faire un second réveil avec l'espoir de meilleures pensées pour enfin pouvoir passer une agréable journée.

La journée de Marie

Par Hélène Zastawny



La porte d'entrée claque, les clés laissées dessus s'agitent. Marie est aux aguets dans son lit, elle attend que le bruit cesse. Elle n'ose à peine respirer sous la couette. Silence.

Elle inspire longuement puis s'étire. Elle peut enfin sortir de sa chambre et envahir l'appartement. Cela faisait des jours qu'elle attendait ce moment, enfin seule ! Ses parents avaient prévu de partir sur la journée pour installer Mémé Yvette dans une maison de retraite et Marie avait prétexté un important examen à réviser pour réussir sa 1ère année d'école en architecture. Ne rien faire et donc ne rien prévoir, telle avait été sa soudaine envie pour cette journée-là.

Marie regarde par la fenêtre du salon. Il est encore tôt, la rosée du matin brille encore dans le parc de la résidence. Marie ferme les yeux. La douce lumière du soleil printanier caresse son visage et elle se met soudain à rêver de la plage où elle a rencontré Juan. Un jeune de son âge, à l'accent hispanique charmant. C’était l’été dernier.

Elle se prépare un café, elle fixe le liquide noir éclabousser les parois de la tasse et s'imagine dans le remous des vagues avec son amour de vacances. Elle sort le paquet de biscottes, ouvre le frigo pour prendre le beurre et remarque le poulet rôti de la veille. La cuisse du volatile l'interpelle, elle ressemble tellement à celle de son bellâtre estival ! L'odeur forte du morbier la réveille. "Faut que je me reprenne !" pense Marie. Elle ferme la porte du frigo avec vigueur. Elle avale son café, engloutit une première biscotte puis une deuxième et allume la télé. Elle tombe sur une chaîne de sport que sa mère a payée pour faire son fitness quotidien. "C’est ce qu'il me faut !" se surprend Marie à dire à voix haute. Et la voilà en petite culotte, sur le tapis du salon, en train de reproduire les mouvements de Mike.

Soudain, la sonnette retentit. Marie, le cœur battant la chamade, éteint vite la télé et se dirige à pas de loup jusqu’à la porte d’entrée. Elle colle son œil au judas. Ahurie, Marie ouvre aussitôt la porte et s’exclame : « Mémé Yvette ! Mais qu’est-ce que tu fais là ? Tu n’es pas avec papa et maman ? ». Sa grand-mère lui explique avoir pris un taxi depuis la maison de retraite. Cela fait une semaine qu’elle a emménagé là-bas et elle ne supporte plus Edmond son voisin de chambre qui hurle des insanités nuit et jour. Elle dit que c’est Michel, l’oncle de Marie, qui l’a emmenée dans ce mouroir. Marie ne comprend pas. Mais où sont donc allés ses parents ? Mémé Yvette évoque une histoire de juge et de divorce, tout en enlevant son foulard à motif floral puis son manteau en peau de mouton. Elle marque un temps d’arrêt, pose son faux sac Vuitton sur le buffet puis se demande quel temps il va faire aujourd’hui. Marie l’observe. Sa grand-mère s’est maquillée, largement tout de même, elle ressemble à Priscilla folle du désert. Son pantalon en simili cuir moule ses cannes de gazelle, vestige d’une jeunesse passée à danser dans les bals de son village. Mémé Yvette s’installe sur le canapé et continue de parler : de son petit chien Chipie décédé il y a huit ans, de ses voyages dans le sud de la France, du jour où elle a rencontré le cousin du beau-père de la voisine qui a serré la main d’Emmanuel Macron, de ses fuites urinaires, du pain savoureux de sa boulangère, de feu pépé qui l’a martyrisée… La logorrhée de sa grand-mère étourdit Marie puis la transporte dans ce bar de Valencia où Juan s’est approché d’elle pour que leur conversation ne se noie dans le brouhaha, leurs lèvres s’étaient alors scellées.

« J’ai faim ! » l’appel du ventre de Mémé Yvette ramène Marie dans son appartement. Un poulet plus tard, la vieille dame s’endort sur le canapé. Le silence reprend sa place. Marie se demande si elle finira comme sa grand-mère, à fuir un lieu de vie qu’elle n’aurait pas choisi, qu’elle détesterait même, à chercher du réconfort et de la tendresse, la chaleur d’un visage familier. Marie renait. « Mémé Yvette, réveille-toi ! On va partir toi et moi, faire un beau voyage. Tu connais l’Espagne ? »

Fanny et Caroline


Par Fanny Embleg.


Réveil à 7 heures du matin, comme tous les jours, je fonce sous la douche, puis fraiche direction la cuisine pour mon petit déjeuné habituel : biscotte – confiture. J’ouvre la porte d’entrée pour prendre la gazette de la région, j’en profite pour admirer la rosée du matin qui perle sur les fleurs. Je réveille Caroline, 6 ans, nous devons aller faire les courses ensemble. Je m’habille, un brin de maquillage et attends que mademoiselle soit prête. 10 heures nous partons vers le super marché d’à côté.
Caroline m’attire vers le rayon habillement enfant, il faut lui racheter une petite culotte. Comme je m’y attendais on prend deux lots de trois. Comment résister à la demande et au joli sourire de ma dernière fille ? Puis on va vers le rayon nourriture, j’ai décidé d’acheter des moules pour ce midi, comme par hasard Caroline veut un poulet rôti, pour éviter toute discussion inutile je prends les deux, on aura à manger pour deux déjeuner et tout le monde sera content. On déambule dans le magasin et passons par hasard par le rayon « Hifi vidéo télé ». Sur un des écran allumé, je vois Emmanuel Macron, parler. Caroline veut l’écouter je refuse, il doit parler dans le désert encore une fois. Je dois avouer honnêtement, la politique je m’en contre balance comme de mon premier sac Vuitton acheté il y a plus de 20 ans.
Nos couses terminées nous rentrons sagement à la maison en se tenant par la main Caroline et moi.

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